samedi 3 octobre 2015

Âme qui vive : prologue.


Prologue

Une fois les quelques bougies allumées, posées ça et là autour de la baignoire, Juliet se glissa avec empressement au cœur de l’eau chaude couverte d’une mousse parfumée. Enfin un petit moment de détente rien qu’à elle ! L’épuisante journée de travail se terminait. À l’école, les enfants avaient été particulièrement énervés et la jeune femme avait eu beaucoup de mal à les garder concentrés. L’excitation de la photo de classe avait fait son effet. Et, malgré ses appréhensions, tous les élèves étaient passés devant l’appareil sans anicroche. Tous, à l’exception d’Iris Shane qui n’en avait encore fait qu’à sa tête. Juliet avait du mal à gérer cette enfant en particulier. Mais en tant que jeune institutrice à peine diplômée, elle devait faire ses preuves et mettait du cœur à l’ouvrage. Elle avait passé près d’une demi-heure à sortir la fillette de ses rêveries pour qu’elle s’installe devant le photographe. Ses collègues la jugeaient trop zélée mais elle les ignorait. Après tout, c’était aussi bien pour l’enfant que pour sa carrière.
   Iris était généralement de nature calme et effacée, ce qui en soi ne posait aucun problème de comportement au sein de la classe, hormis son léger retard dans les exercices oraux. Mais il arrivait parfois que l’esprit de la fillette s’évade, à tel point que rien, dans son entourage, ne pouvait la ramener sur terre. À d’autres moments, Juliet l’avait surprise, parlant seule, à un interlocuteur imaginaire. Les discussions étaient souvent de nature violente et morbide. L’institutrice avait, bien évidemment, averti les parents et Iris suivait depuis un traitement psychologique en parallèle à l’école. La jeune femme y mettait du sien et elle était des plus patientes mais l’attitude de la fillette l’irritait souvent. C’était donc avec un plaisir non dissimulé qu’elle rentrait chez elle, au calme dans son loft, qu’elle ne partageait qu’avec Pacha, son gros et vieux chat gris. Les piaillements et les cris des élèves disparaissaient alors comme par magie, laissant place au silence et à la détente.
      Elle s’enfonça un peu plus dans le bain. Les muscles de son corps se dénouaient peu à peu sous l’effet de l’eau chaude. Les yeux fixés sur le plafond, où les flammes des bougies jouaient un théâtre d’ombres, la jeune femme savoura le silence aquatique. Habituellement, elle prenait un livre et bouquinait longuement. Aujourd’hui, elle n’avait pas besoin de penser à autre chose mais plutôt de ne plus penser du tout. Elle ferma les yeux, vidant son esprit de toute réflexion. Le calme la berça tout doucement. Elle s’endormit.

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